par Nok » 10 Sep 2019, 21:24
Nok courrait à en perdre haleine.
Morts! Ils sont tous ... morts!
Le rêveur courrait dans une ville vide, peuplée de grotesques statues de bois. Ces dernières semblaient taillées dans des arbres bruts, les branches continuellement en train de pousser.
Non, pas morts... Juste... transformés!
Le coureur savait bien que sa fuite était vaine, que le mal étrange n'avait nul besoin de le rattraper, puisqu'il était déjà en lui, comme en témoignait la tache sombre qui grandissait petit à petit sur son bras. Il s’arrêta pour reprendre son souffle, et, avisant la marque, il l'a fixa, détaillant ainsi sa peau devenant ... écorce?
- Mais qu'est ce que..?
Nok se frotta furieusement le bras, faisant tomber des croutes végétales, sa peau dessous semblait comme neuve, mais à peine arrêtait-il que l'écorce semblait revenir à l’assaut de sa peau, poussant et colonisant son bras. Aucune douleur n'atteignait le rêveur, mais une peur indescriptible s'empara de lui.
Son effroi sembla galvaniser l'affection qui le rongeait, son bras devint soudain une branche et le surplus de poids brutal le fit basculer sur le coté. Il se rattrapa à genoux, et immédiatement, des rhizomes sortirent de ses pieds, s’enfonçant dans les anfractuosités de la route.
- eeaEAAAAAAAAHHH!!!
Nok hurla de terreur, il mobilisa son énergie et se remit debout, arrachant les filaments en avançant, un pas après l'autre. Son bras/branche trainait par terre, et à chaque pas, il semblait de plus en plus dur d'avancer, les racines s'accrochant au goudron, arrachant des bouts de chaussé au fur et à mesure de l'avancée du rêveur.
-MAIS PUTAAIIIOOOOOOOOOAAAARGG
Son exclamation se mua en cri inarticulé. Il leva sa main valide, et sentit sa joue devenir rugueuse et grumeleuse. Puis il sentit ses doigts pousser, muer en fines tiges bardées d'épines acérées, qui, en grandissant, se prirent et s’emmêlèrent dans ses cheveux. Les pointes crissèrent sur sa peau, rayant la peau d'écorce sans l’endommager.
Nok sentait son corps se transformer sans rien pouvoir contrôler, il fit encore deux pas au prix d'immenses efforts, puis du s’arrêter. Son corps en profita et d'innombrables racines sortirent de ces pieds, brisant le sol avec une énergie folle, s’enfonçant profondément et ancrant ainsi le rêveur. Son bras branche se redressa vers le ciel, et une multitude de ramification poussa, déployant un feuillage d'un vert éclatant. Son corps, bien que gardant une vague forme humaine, s'épaissit et devint un robuste tronc, et ses doigts changés en sarments de ronces s’enroulèrent autour de lui, formant une barrière impénétrable.
Nok hurla intérieurement, prisonnier de son corps figé, ses pensées tourmentées se mêlant peu à peu à la quiétude de la conscience du végétal qu'il devenait. Progressivement et en douceur, ses souffrances s'estompèrent, et il se coula dans cette nouvelle vie.
Non...
La conscience du rêveur avait eue un sursaut final, jaillissant au cœur de l'entité feuillue. Les feuilles bruissèrent et les branches frémirent.
NON!
La fusion de l'homme et de l'arbre ressentit une énergie incroyable affluer en lui. Sa canopée feuillue captait une puissance solaire infinie, et ses racines assimilaient tous les éléments de la terre, les acheminaient dans son corps pour le développer encore plus.
NON!!
Cet ultime soubresaut de conscience avait rallumé une rage de vivre, un puissant sentiment d'exister.
JE SUIS LA!!!
Cette pensée prit possession de l’énergie formidable de l'arbre et grandit. Nok se reconstruisit mentalement, lançant des attaques sans merci contre l'entité végétal qui menaçait de l'étouffer. Sa colère embrasa tout son être, dévorant et absorbant les réserves de l'arbre.
Extérieurement, la transformation semblait s'opérer à l'envers, l'arbre rapetissa, de violents mouvements se firent, les branches craquèrent et se rétractèrent.
Le combat interieur que se livrait Nok et l'arbre fut sans merci, et au bout d'un moment, le reveur prit le dessus, dévorant, absorbant, assimilant l'arbre.
L'homme se tenait allongé par terre, haletant, le corps tremblant d'une énergie nouvelle.
- JE SUIS LA!
Nous prononçons votre nom, avec regret et fierté,
Nos instincts primaires, vous avez su dompter
Nos âmes sauvages, ont été rachetées,
Un monde offert, dont nous pouvions seulement rêver.