Dreamland Reborn

Faible. Le mot se répétait inlassablement dans sa tête. Plus fort que la douleur qui se propageait au niveau de sa mâchoire. Un sentiment de honte l'envahissait. Tel une maladie qui ronge son hôte, elle lui dévora lentement le cœur. Sa raison pourrissait, étouffé par un sentiment d'amertume. Faible. Il était faible. Vraiment ? Gabriel se sentait désarmé. Toutes les murailles qu'il avait battit entre lui et les autres s'étaient affaissé par l'intervention d'un inconnu. Il était vulnérable, effectivement, il était faible. Sa tête se liquéfia et il reconstitua ses os aqueux. Continuer le combat ? A quoi bon ? Il n'y avait aucune trace d'émotion sur son visage, seul son cœur saignait. Une douleur que le temps ne pansera peut être pas. Il ouvrit les yeux, la réalité était juste devant ses yeux fatigué par la déception. Il les laissa faire quelques pas.

*C'est tout ce que je suis ?*

La puissance et la reconnaissance. Le respect et la paix. Pourquoi cela lui était inaccessible ?

*Je ne suis pas un moins que rien... je suis... je suis...*

Il sentit la colère et le désespoir l'envahir, tentant vainement de s'accrocher à son identité. Mais tout était faux chez lui. Tout ce qu'il croyait n'avait de réalité que pour lui. Mais était-ce vraiment le cas ? Gabriel sentait son âme se déchirer en deux. L'indécision lui faisait tout remettre en cause.

-Non...

Il se releva tant bien que mal. Il ne souffrait d'aucune fatigue physique, mais il était épuisé mentalement. Son regard scruta Melvin, de dos. Ce n'était pas Gabriel qui parlait. Ou du moins, ce n'était pas le masque qui parlait à sa place. C'était lui, son vrai lui.

-Tu te trompes...

Il se tenait droit. Aucune faille dans son regard, aucun regret dans sa voix. Aucune déception dans son aura, ni même la sensation d'un homme défait.

-C'est toi qui est faible. Celui qui méprise et prend autrui pour faible ne fait que refléter sa propre faiblesse.

La tension n'était peut être pas retombé, mais Gabriel n'avait plus aucune colère en lui. Il sentit réellement le vent souffler entre eux. Le vent de la liberté. A travers cette cuisante humiliation il s'était retrouvé. Lui et lui seul. Puis il sourit. Il voulait rire, il riait déjà dans son esprit.

-Tu as gagné le combat. Moi j'ai gagné ma liberté.

Et il la garderait aussi longtemps qu'il le pourrait. Cette sensation d'être soi. De ne plus avoir besoin de se cacher derrière un masque ou un mur. Se sentir léger et errer au gré du vent. Le sens de la vie parait plus censé, vidé de toute haine omnibulé. Il n'y avait aucune raison de continuer. C'était ça, apprendre des tourments de la vie. C'est en un sens ce qui la rend si folle.

[HRP : Ils sont tout chaud mes pavés , si ils nous laissent tranquille t'aura le droit à un réponse spéciale ! ]

Gabriel lui sourit également. Il avait comprit. Les choses viennent un peu tard, mais à quoi bon les nommer. Il incline légèrement la tête et le regarde partir. Plein de choses lui viennent à l'esprit. Gino est partit, il l'a sans doute déçu. C'était mérité. Mais Gabriel n'a aucun regret, rien n'est jamais laissé au hasard. Alors, porté par le vent de ses idées, il se met à réciter. Une épopée qui se fait désirer, un temps qui est abrégé. Sa liberté lui a été rendu.

Le vent porta ses vers, et lui se porta vert son compère. Il l'avait vu sous un mauvais jour mais Gabriel n'était pas un homme cruel. Ses jambes humaines mais d'eau, le mena vers son compagnon à qui il lui donna un beau sourire sympathique. Il haussa les épaules tout en l'appelant. Il avait quelque chose à lui adresser malgré son air agressé.

-J'ai bien réfléchi. Je me fiche bien des guerres et des gens austère. Je crois que serait plus pépère si on ne se mêlait pas de leur affaire. On se fait une prochaine nuit ensemble ou je t'ai fais une mauvaise impression ? Faut dire que je me suis emporté un peu vite mais une fois que c'est fait, c'est fini.

Gabriel hausse les sourcils. Il est gâté, que des surprises. Il se gratte nerveusement la tête mais ne perd pas le sourire.

-C'est d'accord. Je penserais à toi en m'endormant.

Petit malaise dans l'air. Pourquoi est-ce ses phrases ont toujours un sous-entendu pervers quand c'est lui qui les prononce ? A force de parler de cul à tout va, la luxure fini par lui coller à la peau. Il n'y a plus qu'à attendre qu'ils se réveillent. En fait, c'est peut être un message subliminal à destination du narrateur. Et peut être que ça lui demande son avis quand à son poste. Je dis ça, je dis rien hein ! Je suis pas meujeu moi.

* Fin du repas en compagnie de belle famille. On amène les pâtisseries. *

Belle-loch : on a pu lire ce que tu écris. Pourquoi tu ferais pas un monologue sur la fin ?
Kylian : parce que 2012 est passé.
Belle-loch : non, je voulais dire la faim, la faim dans le monde.
Kylian : ô... pourquoi pas. Quoique ce serait pas drôle.
Copine : si, si c'est toi qui crève la fin, on va mourir de rire.
Kylian : ha oui, c'est vrai. Merci de me rappeler que tu es de mon coté.

* Comme il savait très bien ce qu'était la faim, et quotidiennement au studio, il avait pris sa décision. *

Kylian : très bien ! Si c'est comme ça, je m'y mets, et p et p... et pas tout de suite vu que y'a les gâteaux sur la table...




Quelques temps plus tard, après avoir quitté la table


Kylian : monologue sur la faim.

Pour me mettre en condition, je fis le maigre.

Mais personne verra vraiment la différence en fait... enfin quoiqu'il en soit, je tiendrais ma parole.

C'est-à-dire, j'ai jeûné ! J'ai jeûné.

Bien qu'on voyait pas vraiment la différence non plus, on a dit "le jeune jeûne"

Hé ben il part pas gagnant ce monologue.

Et dès que je me suis senti le ventre creux, j'ai compris que la fin était proche.

Heu non, attends

* La porte s'ouvre. *

Copine : purée, même à cette heure-ci, les témoins de Jéhovah viennent nous casser les couilles.
Kylian : ouais, c'est d'ma faute, je t'expliquerai.
Copine : on se mate un film en bas, tu veux venir ?
Kylian : je vais essayer de terminer ça avant.
Copine : un p'tit bisou
bisou
Kylian : tchoubidou
Copine : tu viens quand tu veux.
Kylian : ok.

* Ferme la porte. *

Et dès que je me suis senti le ventre creux, j'ai compris que la faim* était proche.

Kylian : mieux.

Rentré chez moi, je me mis à écrire le commencement de la fin.

Étage en dessous : ON VEUT PAS DE VOS TRACTS POURRIS, FOUTEZ-NOUS LA PAIX

Kylian : .......

le commencement de la faim*.

Kylian : ça devrait pas être permis à 21h...

Il était une fois la faim.

Kylian : ça va devenir moins drôle au bout de la sixième fois.


* Pendant toute l'histoire, Kylian ne parla que de la faim, la faim, la faim, la faim... si bien que pris de fatigue, il s'endormit avec une telle fringale qu'il se retrouva au royaume nourriture. *



Kylian : ben ça c'est pas banal.

* Dans la poche de sa chemise, son manuscrit. *

Kylian : qu'à cela ne tienne !

* Il se dirigea vers la plus proche pâtisserie. Par automatisme sans doute, car tout autour de lui était comestible et dégoulinait le sucre et la miel. Et devant la pâtisserie, y'avait un pauvre qui mendiait "m'sieur, siouplait". Alors Kylian répondit ce qu'il dit toujours en pareil cas : *

Kylian : j'ai déjà donné.
Ha mais pas à moiiiii !

* .............owned *

Je suis un nouveau pauvre ! Je ne suis encore sponsorisé par personne !

Kylian : ben ok c'est cool, si tu veux pas bouffer le trottoir, laisse moi passer.
Je le savais ! Radin !
Kylian : étudiant, merde. Et pis regarde autour de toi, t'as à bouffer partout !
Je ne mange pas de ce pain là !
Kylian : bah prends de la brioche.

* Kylian entra dans le magasin. Personne. Pourquoi tenir une pâtisserie dans une ville où tout se mange ? Parce que Dreamland.


En attendant, il balayait du regard la vitrine. Puis il vit en se retournant, parmi toutes sortes de gâteaux, un millefeuille. Épais, nappé de sucre glace blanc, avec de la crème qui débordait entre chaque feuille. En se penchant, il vit son manuscrit sur la faim dans le monde tomber au sol. Et aussitôt, il entendit une voix intérieure qui lui dit

Tu ne vas tout de même pas manger ce millefeuille à toi tout seul ?

Et puis une autre voix intérieure, encore plus profonde

Chiche.

Et puis une troisième voix qu'il ne connaissait pas.

Tu vas découper ce millefeuille en trois. Tu en donneras deux tiers au Tiers-Monde, et tu garderas le troisième pour toi.

Kylian : je veux pas avoir l'air de marchander, mais... deux tiers au Tiers-Monde, est-ce que c'est pas un tiers de trop ?


* La voix ne se fit pas ré-entendre. *

Kylian : et puis est-ce que ça leur parviendra ? Pour peu que y'ait un intermédiaire mal intentionné qui se moque du Tiers-Monde comme du quart ! et qui prélève un des deux tiers à des faims personnelles ? Autant, je préfèrerais manger les trois tiers en entier, au moins je saurais où ça va...

* Et puis on ne peut pas manger un pareil millefeuille devant tout le monde ! Ce serait indécent, indécent ! Alors il faut se cacher. Mais se cacher, où se cacher ? Dans l'Église, pauvre pêcheur ? *

Kylian : hé oui, pourquoi pas ?

* Mais, et si le curé te surprends ? *

Kylian : je ferais semblant de feuilleter.

* ....... *

Kylian : pis avec millefeuille, j'aime autant te dire que j'aurais de la lecture. Encore qu'elles sont collées entre elles, c'est pas facile, c'pas très pratique

* T'es vraiment la crème des cons... *

Kylian : je prétendais à rien, alors être rien, ça me gêne pas.

* Pense à ceux qui ont faim, homme de peu de foi. Tu me copieras cent fois le mot faim, et sans fin le mot foi. *

Kylian : je suis de confession celtique. Alors ton blabla chrétien, tu peux le remballer et faire une croix dessus. ┼

* Ne blasphème pas. *

Kylian : tu veux une tarte ? dis-je en pointant à peine les gâteaux en vitrine. Cessons-là cette discussion avec le quatrième mur, j'ai déjà assez à faire avec mes démons. D'ailleurs, il est où mon démon ?

* Rien à l'horizon. Enfin si ! Des pâtisseries, des sucreries à perte de vue. Et le manuscrit qui était là à ses pieds. *

Kylian : c'était vraiment une connerie, ce monologue. M'enfin au moins, j'ai eu le mot de la faim.

* Et arrête avec tes jeux de mots sur les mots fins/faims. *

Kylian : tu commences à me brouter, toi...



* Un homme rentra dans le magasin, heureux et hagard, se saisit de baba au rhum, de nonnettes et de chaussons aux pommes, et sortit sans plus demander à personne. *

Kylian : ha ok mais y'a juste aucun vendeur en fait.



* Kylian finit par sortir du magasin, millefeuille entamé en main, la bouche pleine. *

Kylian : bon, et mon démon dans tout ça ? Et Poivre ? Comment je vais faire pour le retrouver ?

Kylian : ha, ouf ! J'avais peur de devoir passer ma nuit à le chercher.

* Poivre se ramenait, et visiblement, il avait pas bousillé une nouvelle voiture dans un tournant. *

Kylian : bah pour être honnête, c'était pas vraiment prévu de se ramener ici. J'ai aucune put*** d'idée de ce qu'on va pouvoir faire là, vu que y'a pas de bibliothèques aux dernières nouvelles...


* Qu'est-ce qu'on disait déjà ? Ha oui... "on pédale dans la semoule ces derniers temps" *

Kylian : tu veux faire un truc ? Tu penses qu'on peut trouver à boire pour accompagner la mangeaille ?