L'odeur de la viande grillé s'était progressivement installé, faisant grogner l'estomac de Gabriel. N'ayant pratiquement rien mangé la veille, une simple odeur le faisait saliver. Il pencha la tête et découvrit une tourte à la viande qui reposait sur le rebord d'une fenêtre. Il n'y avait personne pour la surveiller. Sur le rebord d'un toit, il se releva et leva ses bras en croix. Se laissant tomber, il se rattrapa en attrapant une corde à linge et se laissa glisser dans le vide avant de balancer son corps vers le rebord d'une fenêtre. L'odeur le guidait, et le jeune homme apercevait déjà la fumée transparente, presque salvatrice. Un saut et il toucha terre sans se blesser. L'objet que son estomac réclamait n'était à quelques centimètres de sa tête et l'appelait d'une voix mélodieuse et enjôleuse. En passant sa main dessus, il fit disparaitre la fumée et la refroidit légèrement.
-Tu es à moi maintenant.
Il dégusta la tourte qu'il trouva délicieuse et pour signer son méfait, il ne laissa qu'une part avant de courir dans la ruelle opposé. Un plaisir simple qui ne lui avait pas alourdi le corps, au contraire, il se sentait plus léger. La place paraissait moins bondé que toute à l'heure, cette ville de chien était donc moins populaire que celle des chats qu'il venait de visiter. Ces marchands ne s'étaient pas montré très loquace et la garde qui patrouillait avec zèle l'avait dissuadé de créer le moindre trouble. Ce fut aussi le cas dans cette ville, seulement, ils paraissaient moins tendu.
*Tient ? Un enfant ? Une dispute ?*
Se désintéressant des rondes habituelles des gardes, il reporta son intention sur les auteurs du grabuge. Des gardes qui venaient de tenter une arrestation gisaient à présent sur les pieds du rêveur au regard laconique. Le petit garçon de 13 ans avait l'air de s'échapper des furies d'un adulte, un homme pas très loquace. Ses yeux parlaient pour lui, et le seul mot que Gabriel lu fut : tuer. Un large sourire s'étira sur son visage tandis que son corps faisait office de bouclier au gamin. L'adulte le foudroya du regard avant de s'élancer vers lui.
-Désolé petit, mais va falloir que tu me fasses de la place.
Il lui toucha le front et il le fit disparaitre. Sans le savoir, il venait de le réveiller et par conséquent, de l'envoyer dans le monde réel. Soulagé, Gabriel se détourna de lui pour confronter l'homme qu'il jugea assez malpoli. Ses tentatives de corps à corps furent un échec, car le jeune rêveur se contenta de quelques mouvements de main pour parer les coups qui pleuvaient sur lui. Alors qu'il faisait crépiter des éclairs sur ses doigts, le jeune homme aux cheveux d'or eut comme une révélation. L'élémentaire de foudre avait tout juste eut le temps de finir de charger son électricité et de bondir sur lui que Gabriel avait déjà entamé son action.
#QUOI ?!#
-C'est drôle... j'étais en train de penser. Tout ceci n'est pas réel en fait. Mais j'ai comme l'impression que ce que je vis ici, ce que je vois, ce que je Aoutch !
Il avait délibérément touché le petit arc jaune qui faisait très lentement le tour du doigt de son adversaire, lui même en étant d'apesanteur. Il reprit néanmoins la parole après s'être massé le doigt.
-...ce que je touche... On dirait presque qu'il s'agit de la réalité et non d'un rêve.
Il ferma sa main et l'élémentaire de foudre hurla de douleur alors que son corps se comprimait en un tout petit point, broyant ses organes et ses os. Bientôt, il ne resta plus rien de lui. Il ne saurai dire pourquoi mais il se fit attaquer par un autre voyageur. Voyageurs dont il n'avait qu'une infime conscience. Gabriel approchait de la vérité, il le savait. Mais pour le moment il devait se débarrasser de ce nouveau protagoniste.
-Des épées ?
Affichant toujours un sourire, Gabriel frappa le sol avec son pied et fit sortir du sol un énorme bloc terreux qui prit l'apparence d'une épée plus ou moins grossière. L'échange fut bref, le blond repoussa son adversaire. La colère se lisait dans les yeux de ce voyageur qui matérialisa quelques lames pour foncer droit vers leur cible : Gabriel.
*Penser, imaginer, matérialiser, utiliser.*
Son épée fait de roche tomba en petit morceau sur le sol. Sans qu'il n'ait à bouger des mains, ils lévitèrent et se précipitèrent vers les épées qui se brisèrent au contact des cailloux. En levant la main, ils se placèrent au dessus de lui. En la baissant en s'aidant uniquement du poignet, elles se formèrent ensembles pour prendre la forme de quelques pieux terreux. De sa volonté, elles sifflèrent vers le voyageur horrifié.
Mais elles n'atteignirent pas leur but.
Une pointe dépassait de son épaule. Une pointe en acier. Quelqu'un avait tenté de tuer Gabriel. Un chien à la mine décomposé avait osé lever la main sur lui. Pourtant, il ne s'en offusqua pas, il avait surement ses raisons. C'est surement pour cette raison qu'il ne tua pas le voyageur comme il l'avait fait pour le précédent. C'était surement pour cela qu'il préféra utiliser son imagination pour attacher le voyageur avec des cordes venu du néant.
Le néant.
Ce mot résonna dans son esprit comme note douce, continu. Son sourire revenu.
-Merci. J'ai enfin ma réponse.
Il disparu, réapparaissant un peu plus loin, en hauteur. Cependant, même s'il avait eu sa réponse, un doute subsistait.
-Ce n'est qu'un rêve, ou peut être la réalité. Mais si le monde n'est qu'une illusion, alors ce monde est la réalité. Ou peut être que ce qui est réel n'est qu'illusion. Dans ce cas, l'illusion est la réalité, ce qui voudrait dire que ce n'est qu'une illusion...
Gabriel n'aimait pas ça. Ni ce paradoxe, ni ce début de réponse qui l'effrayait de plus en plus. Si ce monde n'était qu'une illusion ou une réalité illusoire, alors il lui faudrait la détruire. Puisant dans son imagination, le jeune homme pensa à quelque chose de terrible. La lumière du jour fut tamisé par d'épais nuages noirs qui s’amassaient de plus en plus. Sous le regard impitoyable de Gabriel, le monde d'en bas s’enfonçait doucement dans la folie au fur et à mesure que le ciel noir, zébré de couleur dorés, fondait sur le village en un craquement sec, brulant et désintégrant tout sur son passage. Cette peinture fut alors repeint de la couleur du chaos, avant de reprendre son teint de sérénité.
En haut, Gabriel avait une nouvelle fois disparu.