Je marche ... Depuis combien de temps je marche ? J'en ai pas la moindre foutre idée. Tout ce que je sais c'est bien que je marche. Pour aller où ? Devais-je rejoindre une destination précise où étais-je simplement en train de fuir ?
Des arbres autour de moi, la canopée m'empêche de voir le ciel pourtant des rayons de lumière filtre à travers la dense végétation. Le chemin caillouteux défile sous mes pieds. Je suis équipé de simples chaussures, un short et un T-Shirt. Pas de chapeau. C'est triste, j'aime bien marcher avec un chapeau. Mais d'un autre côté il y a pas de soleil alors je n'ai pas réellement besoin d'un chapeau...
Je ne suis pas seul, autour de moi des gens qui marchent, mais je ne vois pas leurs visage, j'essaie bien de leur adresser la parole, mais je n'y arrive pas. Je peux bien tourner la tête vers eux, mais en aucun cas je peux leur parler. C'est dommage, la rando c'est quand même plus chouette quand on peut papoter. Même si faut reconnaître que ça fatigue.
Mais moi non ça va, le rythme est soutenu sans être pressé, je ne me fatigue pas et j'ai largement le temps d'admirer le décor. Les forêts, c'est mystérieux vous comprenez.
Depuis le début, on suit une sorte de chemin balisée ... Ouais, je devais faire une rando... La vache, j'en avais pas fais depuis des plombes des randos... Et j'en avais gardé un mauvais souvenir. En même temps, j'étais mioche à l'époque. Et qui aimait faire des randos avec ses parents passé dix ans hein ?
Tiens ? Pourquoi qu'on bifurque ? On sort du sentier. Ou du moins, on sort du chemin balisé. On suit un sentier hors circuit. Il est plus étroit, plus cabossé. Arpenter le chemin devient un poil plus complexe, il faut faire attention à ne pas se fatiguer, ne pas se blesser, ne pas perdre l'équilibre. Boah, rien de bien compliqué quand on est habitué à crapahuter hein ! Et puis j'aime bien marcher parmi les arbres, c'est cool les arbres.
Tiens ? ça monte pas mal là... C'est déjà moins sympa. C'est toujours chiant les montées, on doit plus forcer sur les cuisses et selon la pente il est plus difficile de bien accrocher le sol avec ses pieds et on est souvent obligé de mettre à parti les bras en s'accrochant aux branches ou aux troncs d'arbres. On se fatigue bien plus et même si après chaque montée, y a une descente ; les descentes c'est pas vraiment tip top non plus ... Oui j'aime râler.
Mais je monte, accompagné de mes joyeux camarades que je sais pas d'où qu'ils sortent, je monte cette putain de pente. Je fatigue bien plus, mais ça va, je gère. Je suis concentré et alerte, mes pieds et mes mains se placent aux endroits bien comme il faut pour que je puisse monter le plus tranquilement possible en étant le plus effiface possible et sans risque de me casser la gueule. Aha ! On voit bien celui qui a fait les scouts ! Et pensez à retenir votre respiration quand vous traversez des orties ! Huhu.
Voilà que soudain les ennuis arrivent. J'adhère plus. Mais vraiment en fait, le lit de petits cailloux glisse sous mon pied faisant que je perd l'équilibre. Je tombe en avant et tente de me rattraper sur ce que je peux c'est à dire des cailloux pas adhérents du tout qui font que je glisse vers l'arrière.
Je glisse vers le bas.
Ouh que j'aime pas ça. Je tombe vers l'arrière... Je sais pas où je vais finir, je tape frénétiquement sur le sol à la recherche d'un truc préhensible qui pourrait mettre fin à ma chute, un truc qui me permettrait de rester ancrer sur le sol. Putain y a rien ! ET BORDEL DE MERDE ! Ils branlent quoi les autres ?! Mais venez m'aider bandes de pute !
Je glisse toujours mais j'arrive à me rattaper à un gros caillou qui sortais du sol. Les gravillons continuent leur chute sans moi. Aha ! Je suis sauvé !
Sauvé oui, mais bloqué aussi... Et comme un con. Je suis cramponné à mes cailloux, je ne veux plus tomber mais j'aimerais bien avancer... Mais je ne peux pas avancer, je ne veux pas avancer, parce que dès que je tente de me redresser ou d'avancer, les gravillons recommencent à tomber en m'emportant avec eux. Je suis complètement paralysé sur ce putain de caillou de merde cramponné comme si ma vie en dépendait.
J'aimerais tellement me sortir de là mais non, un caillou bloque ma route. Pourtant, les gens que je connais pas viennent enfin m'aider. Bon, je dois avouer que je les insulte pendant qu'ils attrapent ma main pour me faire lacher mon ancre. C'est pas que, mais je commençais à me faire à l'idée de planter racine sur ce caillou. La vie était pas plus mal quand on était cramponné à un caillou ne faisant rien d'autre que pas bouger et hurler sa peur. Bon faut avouer que j'avais la trouille de ma vie, mais ces inconnus aux sourires malsains étaient quand même plutôt cool de me sortir d'un tel merdier. Je les remercie avec un calin quand ils me tirent d'affaire. C'est toujours pratique les randos quand t'es accompagné !
On termine la balade, on sort de la forêt. Je suis ébloui par la lumière alors que mes compagnons me bousculent légèrement vers l'avant. Un coup de vent me renvoie à l'arrière tandis que je réalise où je suis. Une falaise. Genre en face, y a un trou béant. Genre je vois des gens en bas, bah les gens, on dirait des fourmis. C'est rigolo comme ça vu de loin avec une barrière de 30 mètres de protection mais là... Bordel de couille d'enculé de pute borgne y a rien. Mais quand je dis rien, je dis rien. Genre je fais un pas et je tombe dans le vide.
Genre là par exemple je tombe dans le vide.
Ah bah oui, mais les sourires malsains auraient du me mettre sur la piste aussi ... Sacré moi !
Je tombe, je hurle aussi ... Je suis en train de me tuer la voix... Faut dire que je vais mourir tout court aussi.
Maintenant que je prends le temps d'y réfléchir (oui l'adrénaline tout ça ...), j'ai toujours eu peur du vide. La peur de cette chute infinie où tout va vite mais où le temps semble ralentir juste ce qu'il faut pour qu'on puisse biiiiiiiiiien profiter du fait que "T'as vu tu vas mourir, t'as vu tu vas mourir". Et puis on tombe, comme un caillou, sauf que les cailloux font pas splotch en en foutant partout. Et puis on peut rien faire. On est juste soumis à la gravité, notre masse, notre poids ... Enfin tous ces trucs, c'est de la physique de lycée ça sacrebleu ! Suivez un peu !
Alors oui, j'ai toujours détesté le vide. Parce que j'ia jamais eu franchement d'équilibre et que vide = chute et que chute = Aïe. Du coup, grâce à un raisonnement hyper-mathématique j'en suis arrivé à la conclusion que vide = Aïe. Je désteste cette sensation que ma vie coule entre mes doigts sans que je puisse rien faire pour arrêter, accélérer ou même dévier un processus inébranlable (comme ta bite). Bordel de merde, on dirait une fucking allégorie du destin.
Quand tu tombes, c'est ton destin de t'écraser comme une fiente.
Bah non, allez vous faire foutre. Ma vie c'est ma vie, j'en fais ce que je veux. Voilà.
Pour la peine, je bats ma phobie et allez vous faire enculer.
I'M ZI AVATAR !
Et vazy que je balance de l'air sur le sol juste avant la chute. Je sais pas comment j'ai fais, mais je m'en branle c'est mon rêve, ma vie, je fais ce que je veux. Si par moment je dois me laisser baloter par les flots pour avancer ALORS SOIT ! Tant que c'est dans mon intérêt, on va dire qu'il y a pas de mal à se faire fouetter la tronche par de l'air super froid qui gerce les lèvres.
Je vous emmerde tous d'abord.
Surtout toi. T'es une pute.