Post rêveur 4
[HRP : âme sensible s'abstenir, ce post va aborder la prise en charge d'un patient grave à l'hôpital et peut donc choquer certaines personnes ]
Bon sang de bois !*Qu'est ce que je pouvais détester les gardes aux urgences. Enfin correctif, j'aimais bien apprendre de nouvelles choses et voir des maladies variées mais ce que je n'aimais pas du tout c'était d'être débordé par l'afflux massif de patients. Et aujourd'hui c'était typiquement le cas, entre la mamie de 90 ans sous anti-coagulants qui avait chuté dans son Ephad et Jean Kévin 19 ans qui vient parce qu'il a mal a la tête et n'arrive pas à dormir,on n’arrêtait pas. Le soucis dans ce genre de situation c'est que la prise en charge des patients se retrouvent impactés par le fait que les médecins et les internes n'arrivent plus à se concentrer car surchargés de dossiers, c'est donc plus facile de multiplier les erreurs d’inattention.*
Putain encore un....*C'était déjà la 5ème colique néphrétique de la journée (pour les néophytes c'est quand on a un calcul dans les voies urinaires) et ça me faisait chier. Non pas que la prise en charge soit difficile mais plutôt par le fait qu'on était en plein mois d'Août et qu'il faudrait penser à s'hydrater en conséquence ESPÈCES DE CONNARDS !!!! Pardon je m'égare, c'est surtout que j'étais occupé à ça alors qu'on venait de nous annoncer qu'on allait bientôt prendre un jeune blessé par balle en salle d'urgences vitales. Je finalisais rapidement le dossier, peut être même trop rapidement pour pouvoir me diriger vers le patient grave qui venait d'arriver.*
Oula...*Le spectacle n'était pas beau à voir, il s'agissait d'un jeune homme qui s'était fait tirer dessus 6 ou 7 fois à cause d'une embrouille de quartier. Il avait les deux poumons perforés ainsi qu'une vertèbre explosée par un impact de balle. A l'arrivée du SAMU son rythme cardiaque était déjà irrégulier, si on n'agissait pas rapidement il allait certainement y passer. Quand je dis "on" cela ne me prend pas vraiment en compte, en effet je n'étais qu'un jeune interne de "Rééducation" qui prenait ponctuellement des gardes aux urgences. C'était surtout les réanimateurs, mon chef urgentiste ainsi que les chirurgiens. D'ailleurs ces derniers avaient commencé à ouvrir le thorax du patient en deux en ouvrant les côtes et le sternum à l'aide d'une grosse paire ce ciseaux. A vrai dire les méthodes de stérilisation n'étaient pas respectés au maximum mais ce n'était pas ce qui comptait dans ce genre de situation. Une fois le thorax ouvert les chirurgiens avaient commencé à masser le cœur directement à la main dans la cage thoracique. Pendant ce temps là les anesthésistes réanimateurs préparaient une transfusion qu'ils mettaient en place directement dans le ventricule droit (c'est à dire directement dans le coeur).*
*En bref on était au max de ce qu'on pouvait faire pour ce pauvre gars, c'était un peu la prise en charge en mode baroud d'honneur. Malheureusement la tension du patient ne remontait pas, son rythme cardiaque continuait d'être anarchique. Il ne fallut pas très longtemps pour que l'équipe décide de stopper les soins et de déclarer le jeune homme décédé. On pouvait penser que le plus dur était passé, mais ce n'était pas le cas. Il fallait maintenant annoncer la nouvelle à la famille. Quelques minutes plus tard un cris de désespoir résonnait dans la salle d'attente. C'était fait... J'appris plus tard que le patient était attendu pour une sortie en mer avec sa femme et son enfant de 10 ans. La vie est parfois cruel. "On ne peut pas sauver tout le monde" c'est ce que chacun se répète dans ces moments là. C'est vrai mais ça n'empêche pas de ressasser un peu le soir en rentrant. Pour finir sur une note positive, c'est après ce genre de moment qu'on se rend compte de la beauté de la vie. Je me dis qu'il faut s'extasier de chaque petite chose qui nous entoure, profiter de chaque instant et des gens qui nous sont chers.*
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*Je me réveillais en sueur dans mon lit, tout les rêves ne peuvent pas être beaux, il faut parfois faire quelques cauchemars.*